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Logo du CLPA Tester les cordes : pourquoi, comment ?

AVERTISSEMENT

Cet article est le récit de ce qui a été une des activités rituelles et essentielles de notre club depuis sa création jusque vers la fin des années 90 suite au décret de la législation sur les EPI. Il ne s'agit pas pour autant d'un manuel technique officiel et aucune garantie ne peut être apportée quant à sa perfection. Il est malgré tout le témoignage de notre expérience en matière de sécurité, pour autant d'autres associations de spéléologues procèdent peut-être d'une autre façon. Pour les membres de clubs débutants, nous conseillons la lecture des manuels édités par l'Ecole Française de Spéléologie traitant de la sécurité (vois l'adresse sur le site fédéral FFS).


Quand la sécurité ne tient qu'à un fil...

  1. Objectif du test

    1. Les fabricants de cordes effectuent des séries de tests de solidité, résistance à l’abrasion, à l’étirement, dans le but d’homologuer leurs produits aux normes en vigueur : la dernière en vogue étant la norme CE, mais on connaît aussi les normes UIAA et ISO 9001. Lorsque vous achetez vos cordes elles sont donc sûres, du moins on est en droit de l’espérer !

      Au cours de son utilisation, mais aussi - et on l’oublie parfois - sans être utilisée, une corde va vieillir et s’user. De fait, ses capacités à résister aux chocs vont diminuer plus ou moins rapidement. Le but du test est donc de vérifier que cette corde n’est pas sournoisement et à votre insu, devenue dangereuse à utiliser.

  2. Principe opératoire (pour corde statique)

Il s’agit de faire subir à un morceau prélevé sur la corde une série de chocs violents afin de vérifier par l’expérimentation s’il y résiste ou s’il casse.  

  1. Le test de cordes au CLPA

    La veille, nous coupons tous les brins de corde et faisons les nœuds. Ces morceaux portent tous l'anneau de cuivre qui marque les cordes (date d'achat, longueur) ce qui permet de les identifier. Les cordes privées de leur bout sont ensuite raccrochées sous l'étiquette indiquant leur longueur, pendant que les brins sont trempés dans un grand récipient plein d'eau. Enfin de nombreuses petites boucles de Nylon de 2 mm de diamètre et d'environ 20 cm de long sont nouées : ce sont elles qui soutiendront la gueuse pendant les quelques secondes qui précéderont la chute.

    Le matin du jour "J", toute l'équipe au grand complet se donne rendez-vous sous le petit pont de l'ancienne ligne de chemin de fer qui reliait au début du siècle Montarnaud à Aniane. Alors que le responsable matos est allé chercher les morceaux de corde et le matériel indispensable, les autres commencent à s'équiper pour la journée : barbecue et bois sec, terrain de jeu de ballon, nattes et chaises longues sous les arbres, vin et grillades au frais dans les glacières : c'est qu'on ne déplace pas une équipe de dix ou quinze personnes sans une logistique impeccable au CLPA !

    A l'arrivée du véhicule contenant la gueuse (généralement le 4/4 muni d'un attelage de Domi) toute la joyeuse équipe hurle au scandale : on est déjà en retard, comment fera-t-on pour faire une "soûle" et une sieste si on commence à une heure pareille ! Ah il est loin le temps où les anciens du club attaquaient le test à 8 heures pétantes...

    Bon an mal an, en une demi-heure la zone est équipée aux normes CE et le pont a pris l'allure d'un laboratoire de test de chez Petzl au grand étonnement des promeneurs. Le 4/4 est en place dos au pont avec une corde reliée à la gueuse, cette corde passe par une poulie fixée au spit en place sur le pont. Les contremaîtres sont en position au sommet avec les brins à tester, les boucles de Nylon et une grande réserve d'énergie bien dissimulée (voir photos). Une échelle ou une corde pend de la rambarde pour y placer presque confortablement le chef d'orchestre : l'ensemble est maintenant opérationnel.

La plupart du temps la manœuvre consiste alors simplement à remonter la gueuse sur 1 mètre, accrocher le morceau à tester et la boucle de soutien, redescendre la gueuse avec précaution, la décrocher de la corde de traction (faudrait pas qu'on arrache le crochet de l'attelage en cas de rupture du brin..), un coup de cutter et le choc qui s'en suit. On recommence trois fois avant de changer le brin de test et de passer à la corde suivante. Les essais vont se succéder avec parfois quelques variantes quand la corde explose d'un coup sec et que la gueuse atterrit violemment au sol par exemple.

Le plus difficile est toujours de s'y remettre après la pause de midi au cours de laquelle les estomacs se sont généralement approchés du poids et du volume de la gueuse. Les "Coteaux du Languedoc", "Corbières" et autres "Costières du Gard" aidant, c'est avec une joie non contenue que le test reprend à l'heure des braves (après la sieste) pour se terminer en fin d'après-midi avec le dernier petit bout de nouille.

Si vous croyez que la journée va finir comme ça vous faites erreur. Tristes de devoir nous séparer si tôt et pour repousser cet instant hélas inévitable, il se trouvera toujours quelqu'un pour dénicher une idée géniale (désob, séance diapo, restau + boîte, ciné...) qui risque de nous mener tard dans la nuit jusqu'au moment où, au bout du rouleau, nous nous promettrons bien de recommencer l'année prochaine.

     

Voici quelques constats qui peuvent être tirés de notre expérience en matière de test de cordes depuis des années.

 Tout d'abord il semble que la fiabilité de la procédure soit bonne car la marge de sécurité est importante. En effet, le choc d'une masse compacte de béton et d'acier reliée directement à un morceau de corde d'un mètre de long en facteur 1 est beaucoup plus violent que celui que subirait la corde en cas de rupture d'un amarrage dans un puits. Dans ce cas de figure, la masse même si elle peut dépasser le quintal, est celle d'un spéléologue dans son baudrier relié à la corde par l'intermédiaire d'une longe dynamique. Une partie non négligeable de l'énergie du choc sera alors absorbée par la masse musculaire du corps, le harnais, les longes, mais également par l'éventuel mou de la partie de corde située au dessus de l'amarrage défaillant. On peut douter également que la même corde ait à subir trois chocs successifs de facteur 1 le même jour et au même endroit. Tous ceux qui ont eu la désagréable surprise de faire un "vol" suite à la rupture brutale d'un amarrage savent bien qu'on prend généralement toutes les précautions possibles afin d'éviter que cela se renouvelle avec le collègue qui vous suit.

Voici maintenant quelques constats suite à plusieurs séries de tests : 

 

  1. Le rôle du responsable matériel

Au sein d'un club, le responsable matériel devra veiller à ce que les cordes qui lui sont ramenées soient correctement lavées et lovées : c'est le minimum à exiger pour améliorer leur longévité. Il pourra aussi décider de la nécessité d'un test supplémentaires pour un lot de corde qu'il soupçonne d'avoir souffert. Grâce à une identification correcte des cordes par marquage il permettra aussi une plus grande fiabilité du test. Mais c'est avant tout sur la responsabilité personnelle de chaque utilisateur qu'il faut insister.

  1. Responsabilité des utilisateurs

C’est grâce à la vigilance de tous que le test qui, rappelons-le, n’est effectué que sur une extrémité de la corde, peut être valide. En effet, seuls les utilisateurs sont à même de déceler une quelconque défectuosité quelque part sur sa longueur. Aucun test ne pourra vous enseigner sur un éventuel défaut qui pourrait traîtreusement se dissimuler ailleurs que sur le brin testé : le test n’évalue que l’usure globale. Laver une corde qui est pleine de glaise avant de la plier correctement pour la ranger n'est pas simplement une opération esthétique. Au cours du lavage, les fibres de l'âme de la corde seront débarrassées des minuscules particules abrasives qui, à la longue, diminueront la résistance de celle-ci. Ce n'est pas le seul avantage : au cours de la manipulation minutieuse exigée par ces opérations, l'utilisateur peut apercevoir les éventuels défauts d'une corde qui aurait été abîmée à son insu (frottement tranchant, chute de pierre...). Il peut alors prendre les mesures nécessaires pour sa sécurité en coupant s'il le faut la corde en deux tronçons sains au niveau de la zone douteuse.

Quoi qu'il en soit, la prévention est la meilleure des armes contre l'usure. Rien ne vaut donc quelques conseils élémentaires de prudence : 

 

  1. Illustrations

Cliquer sur les vignettes pour agrandir les photos.

Gueuse en place

Photo 1
La gueuse est en place,
prête à monter et les
contremaîtres admirent.

Accrochage du brin

Photo 2
Accrochage du brin
à tester. Contremaîtres
toujours vigilants.

Section du brin

Photo 3
Section du brin de nylon.
Mais où sont donc
les contremaîtres ?

Test réussi

Photo 4
Test réussi : remarquez
l'allongement du brin.
Contremaîtres satisfaits !

  1. Annexe

Dans le rôle du travailleur acrobatique 

Les contremaîtres

Christophe S.

Nathanaël B., Sylvie P.,
Jean-Christophe B., Xavier L.

A la remontée de la gueuse
(le pilote du 4 /4)

Le reporter photographe

Assistance technique

Domi L.

Domi R.

Brigitte A., Fabrice L., Jean-Luc S., les conjoints, enfants et animaux de compagnie des uns et des autres...

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